Jeff67 a écrit :Salut tout le monde,
Voilà j'ai toujours remarqué que dans les relations amoureuses il y en a toujours un qui aime plus que l'autre
Bien sûr que non. D'abord, la phrase n'a aucun sens en l'état : l'amour ne se quantifie, sauf chez des cons, capables d'imaginer des "unités d'amour" comme des "crédits-mélancolie".
Jeff67 a écrit :ou alors vraiment différemment.
Oui, bien sûr. Et heureusement, encore que cette évidence soit reniée. Quoi de plus différent qu'un homme et une femme, que toi et celles qui ont pu t'aimer ? Si l'amour était identique et comparable de part et d'autre du couple, l'un des deux au moins (et vraisemblablement les deux) se sentirait volé.
Jeff67 a écrit :Je me demandais si, logiquement une relation saine doit être "équitable" à ce niveau là ?
Il me semble qu'à ce niveau, la sagesse est encore dans la nuance ad hoc : une relation saine repose sur la satisfaction affective, et le contentement philosophique des parties, qui parviennent alors à lui donner un sens à la mesure des exigences du projet : être en couple, à part chez une poignée de lobotomisés incomplets et incapables de vivre par eux-mêmes et pour eux-mêmes,
ça coûte. De l'argent, de l'attention, du temps, de la patience, et ainsi de suite. Je tiens que pour un être équilibré et en paix avec lui-même, cela n'a rien de dirimant. Un coût n'est pas un défaut. Encore faut-il ne pas se raconter de blagues, et s'interroger en conscience sur le sens qu'on peut tirer (et si possible faire naître chez ceux qu'on aime) du couple, indépendamment de la forme que l'amour peut prendre chez chacun.
Voilà pour le seul principe général qui vaille en la matière, à mon sens. Un couple est une association, particulièrement exigeante parfois. Et une association est saine quand elle fait du sens, que son coût est mérité pour toutes les parties concernées. Partir de l'idée que toute association féconde serait par nécessité égalitaire et/ou mimétique me semble absurde. Des relations élève/professeur, disciple/mentor, employé/gérant se trouvent être saines, tout en échappant joyeusement aux règles de la commutativé transactionnelle. Tant que chacun est à sa place et se nourrit à hauteur de ce qu'il attend, où pourrait bien être le souci ?
Jeff67 a écrit :Ou alors si il y a toujours un décalage, comment réagir ? Assumer le fait que moi par exemple j'ai le sentiment d'aimer plus ma copine qu'elle ne m'aime ou alors peut être ne pas trop mettre les pieds dans le plat et conserver un peu de mystère sur mes sentiments ?
L'enjeu n'est pas de déterminer si tu aimes ta copine plus qu'elle ne t'aime. La dialectique suffit :
- Soit ta copine t'aime assez et d'une manière idoine pour que tu y trouves du sens.
- Soit tu te sens malaimé, ou mal aimé.
Dans le premier cas, il n'y a pas matière à "réagir". Dans le second, autant mettre le problème où il est plutôt qu'en se prenant les pieds dans le tapis de ce vertige symétrisant. Si tu te sens aimé et que tu as l'impression d'aller quelque part avec elle, de ne pas perdre ton temps, d'entendre des trucs qui veulent dire quelque chose pour toi et de prononcer des trucs qui veulent dire quelque chose pour elle, la question ne se pose pas. Et si la question se pose, qu'est-ce-que ça peut bien t'apporter de savoir que tu l'aimes plus qu'elle ne t'aime ? Quand tu lis une offre d'emploi et que tu regardes la rubrique "salaire", tu te demandes si cet argent te suffit pour le boulot en question, en fonction de tes besoins et de ta capacité de production. Tu comptes en euros, pas en "milliardièmes de milliardièmes de salaires horaires juin-2004 de Bill Gates", ou en "panier hebdomadaire moyen bengladeshi", si ? Tu regardes combien d'heures ça fait par mois, ce que valent tes heures sur le marché de l'emploi, ce que tu peux espérer ailleurs, de combien tu as besoin pour la routine, et quel rab tu voudrais pour la déconne. Et non pas si ça fait plus ou moins de 65% de la somme versée à ton supérieur direct, plus ou moins de 12% de ton n+6, ou plus ou moins de 0.3% de l'actionnaire majoritaire d'une autre boîte.
Il faut parfois de dissocier un peu de son ego, machine à fantasmes ultime, pour en revenir au réel, même si c'est chiant. Ce qui est réel, ce qui est tangible, c'est tes besoins, pas ton évaluation inquantifiable de ceux d'un autre. A part pour le plaisir (un peu masochiste ou sadique selon le cas, mais toujours cruel et abstrait) de comparer l'incomparable, qu'est-ce-que tu en sais, de ce que l'autre peut recevoir de ton amour ? De ce que ça veut dire pour lui, au fond ? De ses besoins réels, souvent inconscients ?
Jeff67 a écrit :Souvent il y a rupture quand la personne qui "aime moins" s'en rend compte...et c'est ça qu'on voudrait éviter.
Il faudra m'en présenter à l'occasion. Chez moi, les gens aiment ou n'aiment pas, sans que cela revienne à dire qu'ils aiment aveuglément ou stupidement. Mais les gens capables de penser qu'ils "aiment moins", je n'en fréquente pas. La seule idée qui me vienne à ce sujet est que celui qui en viendrait à se formuler les choses de la sorte n'aime pas. Ou en tout cas d'une manière qui exclut de facto le couple amoureux.
Jeff67 a écrit :Si l'un des coachs pouvaient faire un article à ce sujet ça pourrait être intéressant.
A quoi bon, entre nous ? Au mieux, ça donnerait un article technique sur la "finance de la tendresse". Le grand drame d'une analyse au premier degré de la question, c'est qu'elle ne serait pas seulement imbécile et creuse (ce qui passe encore), mais surtout très laide. Faire de la niaiserie c'est toujours regrettable. Pas dangereux, cela dit. Mais quelle rédemption possible pour celui qui a fait du moche ? Le pire, c'est que tu te doutes bien qu'on l'a fait, refait, et rerefait cent fois, comme tout ce qui peut être simultanément con et sinistre. Pour te dire, je me souviens de certains passages d'un manuel puritain anglican, destiné à l'édification des jeunes épouses, et qui devait circuler au milieu XIXème. Comme quoi ça date pas d'hier, ces âneries ... On y trouvait déjà cette question, à quelques chapitres de sermons concernant le dosage exact de réprobation et de concupiscence qu'une jeune femme éduquée devait afficher à l'occasion du coït de la nuit de noces, pour le cas où des requêtes "inattendues" seraient émises par leur mari. Si tu m'en crois, tu laisseras retomber ces poussières : c'est bon pour faire marrer deux minutes, quand on passe au grenier, mais il n'y a rien à en attendre.
Edit : Sur une note comique, j'ai connu personnellement un pervers qui avait pris la décision de larguer femme et enfants après avoir passé le test de l'ennéagramme pour la première fois. Notre société mourra bien assez vite de ses "experts-santé", nul besoin de marquer le pas.