Perdue75 a écrit :Mais c est clair que c est pas honnête
Pourquoi ? Il t'a juré, dans un élan un peu oldschool (oldschool genre Chrétien de Troyes, hein ? Pas genre 1986) de ne jamais poser sa main sur un corps de femme tant qu'il aurait le moindre sentiment pour toi, où que la vie vous entraîne ? Tu es au courant de ses engagements envers sa next ? Dans le cas où tu répondrais par la négative à mes deux questions, sois assez aimable de préciser ta pensée.
Moi, je trouve ça plutôt honnête, au contraire. Dieu sait qu'être amoureux d'une fille avec qui on n'est plus ou on ne peut/veut plus être est assez chiant comme ça, sans en plus s'ajouter la charge de devoir la mettre au courant, avec tout ce que ça entraîne (la nostalgie partagée, la fin en queue-de-poisson, les souvenirs un peu amers, l'espoir déçu d'avance, le mal qu'on se fait et le mal qu'on lui fait, et tout le bordel).
Je me permets de t'offrir mon expertise de mec, en prenant l'exemple d'un sale mec malhonnête, le genre d'ordures qui fait des trucs que toi,
en tant que femme, tu ne pourrais jamais faire. De sale mec paresseux, en plus de tout. Voilà la vérité :
1°) Quand t'es un sale mec paresseux encore amoureux (pauvre pomme !), t'as un peu honte d'être aussi faible.
2°) Si c'est toi qui l'as larguée, même dans le cas où tu t'y serais résolu parce que c'était devenu tout simplement invivable, ou parce que t'as voulu faire le bon choix pour elle, tu te sens un peu coupable. En plus.
3°) Tu as surtout envie d'y penser le moins possible, de faire de la place à la next, pour une semaine ou une vie, afin de te sortir Ex de la tête.
4°) T'as tellement pas envie d'en parler, qu'en général tu mens à tes potes en faisant le cold motherfucker (partition stérile, mécanique et épuisante au possible). Ou tu les envoies chier carrément, dès que ta paranoïa te donne l'impression stupide que l'un d'eux pourrait mettre le sujet de l'ex sur la table.
En somme la pire option pour toi, sale mec malhonnête et paresseux, c'est d'aller appeler ton ex pour lui dire qu'elle te manque. Entendre ce silence à la con de "moi-aussi-tu-me-manques-mais-c'est-toi-qui-m'as-larguée-et-toi-qui-rappelles-alors-je-vais-rien-dire-pour-te-foutre-en-malaise", qui dure toujours 3 siècles comme dans un putain de soap opera des années 70 à cliffhangers moisis du cul. Cacher ta honte dans une formule de sortie maladroite. Devoir nettoyer ton téléphone pour le cas où la next tomberait sur des traces d'appel. Prier pour qu'ex ne se décide pas à rappeler dans 4 heures, après extinction des feux, au risque d'une prise de tête matinale avec sa remplaçante. Te dire que t'es encore passé pour un gland. Ne pas savoir ce que l'ex en pense. Te douter qu'elle rappellera pas parce que tu lui as passé le goût du risque en la larguant (même dans le cas improbable où tu lui manquerais aussi). Du coup, t'en vouloir d'avoir espéré 2 minutes plus tôt qu'elle ne rappellerait pas dans 4 heures, après l'extinction des feux. Enfin, le plus dur, attendre Bobonne-next et l'écouter te raconter sa journée insipide en pensant à ton ex. L'écouter aussi te demander toutes les 3 minutes pourquoi t'as l'air absent, et répondre "pour rien, chachou (ou n'importe quel pseudo dégoulinant de début de relation qui t'écorche la bouche)", en sachant par avance qu'elle reposera la question dans 3 minutes comme une pendule infernale. Et devoir recommencer tout le travail entrepris de guérison avec la next. Laquelle, entretemps, est devenue tout-à-fait odieuse depuis que tu repenses à l'ancienne, ce qui rend ce nouvel essai d'autant plus pénible et foireux.
Autrement dit, pour un mec sincère et monogame, cas le plus fréquent (j'en parle d'autant plus sereinement que je suis baratineur et découcheur) ... c'est un travail d'honnêteté considérable. Le genre d'honnêteté tellement pète-burne et amère qu'on ne s'y risque que par un sentiment de piété et devoir inévitable, absurde, sans pouvoir seulement s'expliquer pourquoi on le fait ni ce qu'on en attend. Le genre d'imperiums honnêtes auxquels on cède sans plaisir, dans le regret toujours, et parfois la crainte, sans une once d'espoir en tout cas. En sachant qu'on va se faire du mal à soi, sans doute faire du mal à l'ex, faire du mal au pansement (qui est con, mais qui le mérite pas), mais qu'il faut quand même le faire. Parce que ça a du sens. Parce que c'est pas normal de devoir faire semblant à ce point pour s'en tirer un peu. Parce que quand on lui avait dit "je t'aime" à la cafet, comme un chiot dressé avant d'être adopté, comme un rien du tout, comme une merde, on n'avait pas signé pour ça. Parce qu'on a besoin qu'elle sache, même si on préfèrerait s'arracher une couille que savoir ce qu'elle en pense exactement une fois qu'on lui a dit. Ca peut être ça aussi, l'honnêteté, le genre de trucs qui peut très bien te tomber sur la gueule un bon matin, en tant que femme incapable de faire ça, ou en tant que sale mec dégueulasse.
Pour en revenir à mon sinistre cas, c'est une honnêteté que je n'ai jamais eue. Même pour les rares "ex" (et je suis vraiment obligé de mettre des guillemets) que j'ai pu aimer un tant soit peu sérieusement. Plus hypocrite, ou plus distrait, ou moins doué pour le malheur que les autres ... je vois un cul qui passe. Et j'oublie. Tout.
Faute de me laisser couler, je coule mes souvenirs, morceaux par morceaux, les ex avec les animaux morts de mon enfance, la chambre bleue, mon anniversaire de 7 ans. Ma next me connaîtra sous un autre nom, sous une autre lumière. Et auprès d'elle ou d'une autre, je me réveille chaque matin innocent, neuf. Presque puceau. Gai, carrément, de temps à autre. Mais ... certainement pas "honnête".