just1k a écrit :Bon.... Perdu de Recherche qui s'énerve en citant du Eckhart Tolle non-stop sans jamais le mentionner.
A vrai dire, je ne le mentionne jamais parce que je l'ai découvert très récemment. Je ne le connaissais que de nom, de réputation et par extraits, avant qu'on me conseille de le lire vraiment. Sur ce forum, d'ailleurs. J'y ai vu un vulgarisateur assez médiocre, qui avait pigé le gros du message, mais s'emmerdait à le traduire de manière laide et laborieuse en langue américaine "for the dummies", ce qui me gênait un peu. Je ne le crois pas idiot, mais son travail me semble assez remarquablement inutile. Par ailleurs, son incapacité à percevoir le fond élitiste, aux deux sens du terme, des voies abruptes me donne à penser qu'il n'a pas encore fini de dérouler la chaîne de sa propre idiosyncrasie. Eckhart TOLLE vend une manière compliquée et lourde de penser la non-pensée. Laquelle est évidente et simple. Il est dans le bon camp (le camp du fond), mais il en garde une approche technicienne un peu creuse par moment, du fait même qu'il essaie de démocratiser et de théoriser ce qui reste une praxis d'élite et de perfectionnement illimité. Alors ... tout en lui reconnaissant quelques mérites au plan humain, pour le peu que je sais de lui, j'ai beaucoup de mal à accrocher.
Si tu cherches mes propres influences, tu les trouveras entre les grands du zen sôtô, tous les stoïciens et néo-stoïciens, Spinoza (qui est paradoxalement une catégorie et une synthèse à lui tout seul), et un certain nombre d'électrons libres de tout bord, comme Maître Eckhart, saint-Thomas, Heidegger, et ainsi de suite. Pour être plus exact, j'avais déjà un peu tout lu, et "comprenais" sans saisir. Parce que je restais dans une exégèse relativement intello qui me conduisait à prendre l'essentiel pour un détail ou une coquetterie, et à me concentrer sur les vérités mineures que l'essentiel engendrait. C'est le zen qui a catalysé ma compréhension profonde de toutes ces lectures précédentes, en me donnant précisément ce qui fait encore défaut à TOLLE, de mon point de vue : l'intuition profonde et "sensible" de ce que la pratique peut être un dépassement de la pensée sous certaines conditions, plutôt qu'une base expérimentale attendant d'être résumée et universalisée par le logos et le verbe.
just1k a écrit :J'avais déjà ciblé quand t'avais commencer à parler de l'égo.
Il me semble que c'est précisément en cela que TOLLE échoue : on peut le "cibler", quand la destruction de l'ego ne se cible pas. Elle s'expérimente. Ou pas. Le problème de TOLLE et de ceux qui pensent l'avoir compris, c'est qu'il amène à une "idée du dépassement de l'Idée". C'est en cela que le zen m'a sauvé et m'a permis de raccrocher les wagons avec les grands maîtres que j'ai cités plus haut : La pratique m'a finalement fait entraver, avec retard, que l'empire du discours est lui-même silencieux. Et qu'il y avait une expérience à trouver, non pas en aval du discours du discours mais à sa source.
just1k a écrit :En tous cas, c'est une bonne suggestion d'écouter soit son audiobook pour le documentaire sur lui ou ses conférences (qui sont en anglais par contre).
Justement pas. Je crois que ce qui empêche les curieux de TOLLE de comprendre le silence, matrice inconditionnelle de toute vérité métaphysique un tant soit peu sérieuse, c'est qu'ils se figurent qu'on peut l'écouter sur audiobook, justement. Je te recommanderais, à l'inverse, de ne pas tomber dans le panneau qui m'a fait perdre plusieurs années et de passer directement au fond des choses : fermer ta gueule. Au dôjô, si tu te sens un goût pour "l'emballage" nippon. Seule, si tu préfères te faire ton petit machin. Mais sans bouquin, sans audiobook, et
surtout sans pré-conception ou idée (ce que tu sembles appeler "ciblage") d'aucune sorte. En cette matière, vouloir cibler, c'est déjà se planter. En cela, le kyûdô comme art zen pose bien les choses : la cible n'est pas le but d'une visée opérante et délibérée, elle est l'extension naturelle et inéluctable d'un geste parfait et gratuit. Il s'agit moins de viser pour taper dans le 1000, que de taper dans le 1000 parce qu'on a compris comment arrêter de trembler en essayant de viser. Il fournit une expérience très directe (et jouissive) du geste, une fois libéré du "parkinsonisme" d'une somme d'attentes et de techniques infiniment sclérosantes. Un genre de Bible qui commencerait par "Au commencement était le Silence".